La pudeur et ses méfaits

La pudeur dissuade les chrétiens de témoigner de leur foi et d’aller à la rencontre de ceux que l’Esprit saint a placés sur leur chemin.

La pudeur inverse l’ordre des priorités : elle substitue la peur de commettre un impair ou de paraître importun à l’urgence d’aimer.

Quand le Christ nous commande d’aimer notre prochain la pudeur vient susurrer à notre oreille : N’en fais rien : vous n’avez même pas été présentés…

La pudeur fait avorter toutes les rencontres que Dieu avait prévues pour se révéler à autrui à travers nous.

La pudeur  nous fournit hypocritement mille arguments : l’eau est trop chaude, l’eau est trop froide, l’eau est trop tiède…

La pudeur flatte notre pusillanimité, atrophie en nous la vie et bannit la spontanéité.

Elle étouffe progressivement notre générosité et notre capacité d’indignation face à l’injustice.

La pudeur nous emprisonne et nous empoisonne : elle nous renferme en nous-même et nous inocule le virus de l’indifférence qui rend aveugle et sourd à la fois à la vérité et à l’amour.

C’est cette indifférence aux autres dont le pape François nous dit qu’elle est infiniment plus contraire à Dieu que tous les faux-pas qu’il nous arrive de faire en allant vers eux.

En créant de la distance entre nous et autrui la pudeur nous isole et nous aliène en nous détournant de notre seule vocation qui est d’aimer.

La pudeur nous fait dépérir et rabougrir.

La pudeur est une maladie mortelle qui prétend figurer au rang des vertus.

La pudeur est le masque de l’Ennemi !


4 réflexions sur « La pudeur et ses méfaits »

  1. Ennemi…quand elle est poussée à l’extrême, oui ! Mais il est dit aussi (de mémoire!) « que ta main droite ignore ce que donne ta main gauche », « quand tu veux prier, enferme-toi dans ta chambre… »
    C’est une forme de pudeur, non ?
  2. Quand la main droite ignore ce que fait la main gauche ou quand on se retire dans sa chambre pour prier plutôt que de le faire au vu et au su de tous c’est pour ménager notre ego et donc ne pas fausser nos relations avec autrui (Dieu et nos frères).

    La pudeur en revanche a tendance à interposer notre propre sensibilité entre nous-même et autrui. C’est souvent une préférence accordée à l’évitement au détriment de la rencontre. Concrètement elle nous détourne de reconnaître le Christ dans notre prochain et d’aller à sa rencontre. La pudeur restaure les catégories du pur et de l’impur – c’est-à-dire les outils de l’exclusion entre ceux qui sont réputés purs et ceux qui sont réputés impurs – que le Christ avait patiemment démontées, notamment avec la parabole du bon Samaritain.

  3. Cher ami,
    Il me semble que tu parles de la pusillanimité, plutôt que de la pudeur. Au contraire, la pudeur me paraît cette réserve propre au rapport authentique à autrui : quand la retenue dans le rapport appartient à ce rapport même…
    1. Oui mais la pudeur est très souvent l’alibi de certains cathos pour ne pas témoigner de la foi qui les fait vivre (dans l’hypothèse, bien sûr, où c’est bien leur foi qui les fait vivre où la foi les anime effectivement). Certes il s’agit bien d’une pusillanimité qui se drape dans le manteau de la pudeur mais la pudeur elle même n’a de légitimité qu’à condition d’être ordonnée à l’amour d’autrui.

      La brandir comme un bien en soi n’a non seulement aucun sens mais c’est surtout un intolérable contre-sens : le Dieu que nous professons est un Dieu qui a renoncé à la bienséance. Il n’a pas hésité à s’humilier en faisant le premier pas. C’est Lui qui a pris l’initiative d’aller à la rencontre d’Abraham. C’est Lui qui assume la position humiliante du demandeur tout au long de la Révélation. C’est Lui qui choque la pudeur spontanée des hommes en choisissant de s’incarner quitte à créer la stupeur et le rejet (« Scandale pour les juifs et folie pour les païens »).

      Alors prétendre être témoin de la Bonne nouvelle tout en prétendant ménager la pudeur c’est un peu comme prétendre faire une séance de natation sans se mouiller. Eriger la pudeur en vertu c’est juste souscrire au principe de la bourgeoisie française qui veut qu’à table on ne parle pas d’argent, pas de politique et pas de religion. C’est un des critère de cette mondanité contre laquelle le pape François vous met continuellement en garde. Au fond l’alibi de le pudeur c’est le pavillon de complaisance de tous ceux qui préfèrent être les garants des institutions et de la société plutôt que des signes de contradiction aux yeux des hommes. Plutôt un renoncement qu’un désordre en quelque sorte.

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