Je crois pour comprendre et je comprends pour croire

Le blogue catholique québécois Le verbe propose des réflexions pour nourrir la vie chrétienne et témoigner de la foi. Son rédacteur en chef adjoint, James Langlois, nous propose une réflexion sur ce que l’on appelle croire en Dieu. Tous les articles de ce blogue peuvent être consultés sur  https://www.le-verbe.com/blogue/ et peuvent être envoyés gratuitement (https://www.le-verbe.com/abonnements-et-dons/).

« Dans notre société moderne, caractérisée par un esprit scientifique, matérialiste et rationaliste, tous conviennent qu’il est absurde de croire à quelque chose ou en quelqu’un sans motifs suffisants et crédibles. Connaître une réalité par le biais du témoignage d’un tiers, c’est ce qu’on appelle la foi : croire à quelque chose, croire quelqu’un, croire en quelqu’un.

Or, comme l’a déjà très bien expliqué le collègue Sylvain Aubé, la foi humaine sert dans tous les palais de justice et plusieurs de nos connaissances procèdent par celles-ci : nous croyons le médecin, nos professeurs, les scientifiques, seulement parce que nous leur faisons confiance. Nous n’avons pas l’évidence de la plupart des choses que nous pensons savoir.

Quand on arrive à la foi qui porte sur Dieu ou sur des sujets spirituels ou surnaturels, la foi a mauvaise réputation : elle est vue comme suspecte, douteuse, voire stupide. Je pense de fait comme M. Lévesque que c’est faire injure à l’intelligence humaine que de croire à des choses de manière aveugle et sans fondements : c’est ce qu’on appelle du fidéisme ou de la crédulité, et ce n’est pas la conception chrétienne, ou du moins catholique, de la foi.

Raison et révélation

Faisons d’ores et déjà la distinction entre la philosophie, qui concerne la raison, et la religion, ou la foi en Dieu, qui exige une révélation : pour avoir foi en Dieu ou en sa parole, il faut d’abord qu’il ait parlé; la foi est la réponse à cette révélation.

Quand, dès lors, on parle de théisme (ou de déisme/panthéisme,etc.), c’est avant tout une position philosophique, donc rationnelle. Appuyée par certains arguments, cette position postule l’existence d’un être intelligent, d’un principe ordonnateur de la nature, transcendant ou non, qui intervient ou pas dans le monde. La philosophie, la raison, ne prétend pas croire en, elle tente d’affirmer, de prouver. C’est ce que fait Aristote dans sa Métaphysique, Thomas d’Aquin dans les premières questions de sa Somme Théologique ou René Descartes dans ses Méditations.

Dans la théologie catholique, foi et raison ne s’opposent pas.

Le mystère chrétien de l’incarnation et de la rédemption – auxquels le chroniqueur fait référence – ainsi que la possibilité d’une dimension surnaturelle, concerne un Dieu qui se révèle et qui, par le fait même, veut donner à connaître des réalités qui surpassent la raison humaine. On quitte la raison pour entrer dans la foi.

Dans la théologie catholique, foi et raison ne s’opposent pas : Dieu, qui est le créateur de l’intelligence et de la réalité, ne demanderait pas de croire en des vérités qui contrediraient ce que la raison pourrait découvrir par elle-même. Inversement, la foi ne nie pas l’intelligence, mais elle la suppose: il faut bien quelques motifs de crédibilité pour donner son assentiment à une parole ou à des réalités dont nous ne pouvons pas avoir l’évidence.

Croire ou ne pas croire

La foi donc, qu’elle soit en des êtres humains, en Dieu ou en des témoins qui rapportent leur expérience de Dieu, et même si elle ne repose pas sur une évidence scientifique ou sensible, n’est pas pour le moins irrationnelle.

Au lieu de nous demander, comme le chroniqueur, «est-il raisonnable de croire en Dieu?» (ce qui voudrait dire croire en sa parole) je poserais la question ainsi : est-il raisonnable de penser que Dieu existe? Car sa formulation suppose  que l’idée d’une cause intelligente à l’origine de notre monde ne peut pas être rationnelle, qu’elle ne peut que reposer sur un saut aveugle dans la foi, qui vient d’une adhésion personnelle.

Croire ce n’est pas voir, que ce soit avec les yeux du corps ou de l’intelligence. Sous cet angle, la foi est l’opposée de l’évidence.

Quand M. Lévesque demande, au final, «est-ce bien raisonnable de croire en quelque chose dont nous n’avons aucune preuve?», la question est tordue dans son principe : quand nous avons des preuves, nous n’avons pas besoin de croire. Il faudrait plutôt se demander : «est-ce bien raisonnable de croire à quelque chose pour lequel nous n’avons aucun motif crédible?»

Un jardin sans jardinier?

Citant Dawkins en introduction de son texte, le chroniqueur semble nous dire qu’il est absurde de penser qu’un jardinier précède à l’existence d’un beau jardin. Qui, en voyant un magnifique jardin ordonné, ne déduirait pas d’emblée qu’il s’agit là d’une oeuvre intentionnelle? Quand nous voyons de la fumée monter au-delà de l’horizon, doutons-nous qu’il y ait un feu ou avons-nous besoin de le voir pour en avoir la certitude?

Jésus le Christ n’est pas un concept, mais un être personnel.

L’ordre implacable et toute la beauté de la nature, de notre ADN jusqu’aux galaxies, me suffisent à penser, comme nombre de scientifiques dans l’histoire, qu’il existe une intelligence derrière cette création. Il me semble de ce fait beaucoup plus irrationnel et absurde de croire que nous venons du néant et que nous y retournons.

Quant à Jésus le Christ et au Dieu chrétien, il n’est pas un concept, mais un être personnel que nous pouvons rencontrer de plusieurs manières. En ce temps de Pâques, ceux qui ont expérimenté le passage de la mort à la vie célèbrent Celui qui, le premier, a ouvert le chemin d’une Bonne Nouvelle témoignée depuis maintenant plus de 2000 ans ».

James Langlois

James a étudié l’éducation, la philosophie et la théologie. Son cursus témoigne de ses nombreux champs d’intérêt, mais surtout de son désir de transmettre, de comprendre et d’aimer. Il est rédacteur en chef adjoint au Verbe depuis juin 2016.

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