Faire le mâle c’est pas bien

« Vivre sans temps mort et jouir sans entrave », « Je prends mes désirs pour la réalité car je crois en la réalité de mes désirs » ou «On ne revendique rien, on prend » sont autant de slogans qui ont fleuri en mai 68 et dont est issue la nouvelle morale de nos sociétés occidentales.

Les acteurs de mai 68, eux, sont devenus les représentants de ce qu’il est désormais convenu d’appeler le progressisme c’est-à-dire la suppression de tout ce qui, auparavant, entravait la libre-initiative et la libre-jouissance, qu’il s’agisse de la morale traditionnelle ou des limites imposées au libre-échange.

De ce grand changement de paradigme les femmes sont souvent présentées comme les grandes bénéficiaires et les grandes gagnantes. Pourtant de Dominique Strauss-Kahn à Harvey Weinstein en passant par Denis Baupin on s’aperçoit que les champions toute catégorie du progressisme sont parfois les pires prédateurs et que leurs comportements bénéficie d’une impunité que leur confère précisément leur brevet de progressisme.

Dominique Strauss-Kahn incarnait la gauche réformiste en phase avec l’économie ouverte ; Harvey Weinstein figurait parmi les plus grands donateurs du parti Démocrate américain, multipliait les dons à des associations luttant contre le sida ou la pauvreté et avait versé 5 millions de dollars à l’université de Caroline du Sud pour aider les femmes metteurs en scène. Denis Baupin n’avait pas hésité à poser sur une photo avec du rouge aux lèvres pour la journée de la femme…

Bien sûr on peut objecter que le clergé catholique fournit, lui aussi, de très bons exemples de prédicateurs faisant le contraire de ce qu’ils prêchent en matière sexuelle. Pourtant il existe une différence fondamentale entre les deux.

Dans le cas de prêtres, d’évêques et de cardinaux ayant commis ou couverts des abus sexuels on peut leur reprocher leur (in)conduite non seulement au nom de la morale traditionnelle mais aussi et surtout on peut leur reprocher à juste titre d’avoir trahi les prescriptions de l’Evangile et l’amour du prochain dont ils se voulaient les témoins et les garants. Ce qu’on peut et ce que l’on doit leur reprocher c’est leurs incohérences et leurs trahisons.

Dans le cas des apôtres du progressisme issu de mai 68 leurs comportements ne sont condamnables qu’au regard de la morale traditionnelle qu’ils ont eux-mêmes jetée aux orties pour pouvoir vivre sans temps mort, jouir sans entrave, prendre leurs désirs pour la réalité au nom de la réalité de leurs désirs et, finalement, prendre tout sans rien revendiquer. C’est la démonstration empirique qu’ils sont restés fidèles à leurs convictions de jeunesse…pour le plus grand malheur des femmes qui ont croisé leurs chemins.

Car la libéralisation des mœurs induite par mai 68 a constitué une gigantesque régression pour la condition féminine que le vernis du discours progressiste dissimule de moins en moins.

Elle met un terme à une période de l’histoire pendant laquelle la femme a humanisé l’homme en endormant le mâle qui sommeillait en eux. Aujourd’hui  nous assistons au retour de l’empire du mâle.

1/ L’empire du mâle contre-attaque

Livré à ses pulsions naturelles l’homme n’est plus qu’un mâle et se comporte comme tel. Sans même nécessairement penser à mal. Sans même penser du tout puisqu’il est de nouveau guidé par ses instincts. Car s’il a suffisamment de sang pour approvisionner à la fois son intelligence et sa libido il n’en a malheureusement pas suffisamment pour approvisionner les deux en même temps.

Livré à ses pulsions naturelles l’homme se comporte comme un mâle. Un mâle opportuniste qui cherche à satisfaire ses pulsions en tirant le meilleur parti des circonstances favorables et des opportunités… parfois à l’aide de stratégies plus ou moins élaborées. C’est connu de toutes les femmes : quand les hommes ont obtenu « ce qu’ils voulaient » ils ont tendance à se désinvestir progressivement de la relation quand ils ne désertent pas purement et simplement ce qu’ils considéraient comme un champ de bataille.

Car le mâle multiplie les « conquêtes », terme militaire qui signifie bien qu’il considère spontanément la femme comme un adversaire à soumettre plutôt que comme une partenaire avec laquelle s’engager. Il envisage la relation sexuelle davantage comme une activité sexuelle que comme une relation humaine.

Et quand les mâles cherchent à se justifier ils invoquent invariablement la liberté. Du moins leur liberté. Dominique Strauss-Kahn revendiquait son « libertinage » tandis que Denis Baupin se décrivait comme un « libertin incompris ».

D’où la différence avec les femmes qui, parce qu’elles envisagent plus fréquemment de s’investir dans une relation, se projettent plus volontiers dans l’avenir : rencontre, échange, partage, don et abandon puis éventuellement développement d’une relation stable, construction d’un couple, accueil et éducation des enfants.

D’où la position d’infériorité structurelle de la femme dans ce que Marivaux avait appelé le jeu de l’amour et du hasard. Au petit jeu de la séduction la femme est doublement pénalisée.

D’abord parce qu’elle risque plus gros en cas d’échec. Elle risque plus gros parce qu’elle mise plus gros et elle mise plus gros parce qu’elle vise plus haut. Elle attend beaucoup plus d’une rencontre amoureuse qu’une passade d’un soir. Même réussie.

Ensuite et surtout parce que le temps joue contre elle et en faveur de l’homme. Le temps qui passe permet à l’homme de mûrir et fait fructifier son capital d’attractivité (personnalité, sagesse, expérience, prestige) mais, à l’inverse, érode le capital d’attractivité de la femme (beauté, grâce, jeunesse, prestance).

Un homme mûr attire beaucoup plus facilement des femmes jeunes et jolies que l’inverse. Bien sûr cela peut arriver : de la pièce de théâtre Harold et Maud au couple présidentiel actuel on peut trouver des contre-exemples. De même qu’il existe des poissons-volants. Mais ce n’est pas la majorité de l’espèce.

Le constat est cruel et c’est pour cela que l’on utilise l’euphémisme de « famille monoparentale » pour désigner ces femmes qui restent seules à élever leurs enfants après que leurs compagnons les aient quittées. Le départ se fait très majoritairement  dans le même sens : ce sont les hommes qui partent et les femmes qui restent avec les enfants.

Le constat est cruel mais la réalité n’est pas nouvelle. Elle est même consubstantielle à la condition humaine depuis la chute. C’est une des conséquences du péché originel. La Bible l’exprime clairement :  Il [Dieu] dit à la femme : « J’augmenterai la souffrance de tes grossesses. C’est dans la douleur que tu mettras des enfants au monde. Tes désirs se porteront vers ton mari, mais lui, il dominera sur toi. » (Genèse 3, 16).

2/ L’apparition de l’homme est le triomphe historique de la femme

La nature est particulièrement défavorable aux femmes et, en Occident,  la culture est venue lui faire contrepoids. Pendant des millénaires les femmes se sont efforcées de domestiquer les mâles dans le but d’en faire des hommes dignes de ce nom.

Elles se sont efforcées de réprimer leurs tendances brutales, anarchiques, égoïstes et stériles (violence, libido anarchique, ivrognerie, jeu). Ce faisant elles sont parvenues à enchaîner leurs hommes au foyer ce qui est le sens littéral du mot husband (mari) en anglais : house-bound signifie littéralement « lié à la maison ».

Ce lien est parfois perçu par les intéressés comme une chaîne et, en un sens, c’est vrai. Le sens des responsabilités implique forcément une restriction de la liberté. Choisir implique de renoncer. Choisir c’est renoncer. Choisir c’est assumer une certaine dose de frustration en échange d’un bien plus grand et différé dans le temps. Mais c’est à ce prix que le mâle, spontanément inconséquent et égoïste, peut accéder au statut d’homme responsable et doté d’un sens moral.

Tel est le prix à payer pour grandir en humanité. Tel est le prix de l’humanisation de l’homme. Telle est la condition de possibilité d’une relation humanisante entre l’homme et la femme. Cela n’a rien de naturel, c’est une construction culturelle, une victoire de la civilisation, un acquis sociétal. Le temps qui passe a fini par nous convaincre que l’humanisation de l’homme et la connivence entre les sexes étaient « normales » alors que fondamentalement l’apparition de l’homme est le triomphe historique de la femme.

A l’inverse la « libéralisation des mœurs », fièrement revendiquée par les apôtres de mai 68, a fait voler en éclats cet acquis de civilisation laborieusement et patiemment conquis pendant plusieurs siècles en Occident. Les slogans comme « jouir sans entrave » ou « faites l’amour pas la guerre » ont donné le feu vert à la grande régression masculine pour le plus grand malheur de la condition féminine.

L’égoïsme de la pulsion masculine s’en est retrouvé légitimé, flattée et encouragé par la société. Les mâles ont désormais reconquis le territoire qu’ils avaient perdu et l’ont même agrandi grâce, notamment, au soutien de féministes en peau de lapin qui refusent d’admettre que ce que l’on a appelé la libération des mœurs a consisté à émanciper les hommes de leurs devoirs envers autrui.

Auparavant on réprouvait l’égoïsme des hommes qui abandonnaient des femmes après les avoir, selon l’expression consacrée « séduites et abandonnées ». Aujourd’hui les mêmes hommes sont « libérés » de cette culpabilité et de tout devoir grâce à la pilule contraceptive et à l’avortement légalisé. Ils peuvent désormais, en toute quiétude, baiser sans s’engager. L’idéal de la mobilité nomade et des décisions unilatérales – l’idéal du mâle – est devenu la norme morale…. Y compris pour les femmes désormais sommées d’adopter le même comportement nomade et prédateur au nom de l’égalité. On comprend bien le raisonnement : l’égalité dans l’irresponsabilité rendrait les femmes elles aussi « libérées ». C’est l’extension aux femmes de ce que le modèle masculin a de pire. L’idéal du mâle est devenu l’acquis sociétal d’une société désormais acquise à la mentalité libérale.

Pourtant aujourd’hui ce sont surtout les femmes qui en supportent le poids et qui en payent le prix : le marché du désir et le marché du travail sont devenus de plus en plus volatiles, la compétition de plus en plus impitoyable, l’instabilité croissante et leurs vies de plus en plus précarisées.

Comme l’écrivait Michel Houellebecq : « elles doivent parallèlement, et parfois pendant plusieurs dizaines d’années, se consacrer à l’entretien de leur « capital séduction », dépensant une énergie et des sommes folles pour un résultat dans l’ensemble peu probant (les effets du vieillissement restant grosso modo inéluctables). N’ayant nullement renoncé à la maternité, elles doivent en dernier lieu élever seules le ou les enfants qu’elles ont réussi à arracher aux hommes ayant traversé leur existence – lesdits hommes les ayant entre-temps quittées pour une plus jeune ; encore bien heureuses lorsqu’elles réussissent à obtenir le versement de la pension alimentaire »[1].

3/ Libération du mâle et culture de la femme-objet

Désormais épuisées par leurs doubles journées les femmes occidentales ploient sous le double poids de la charge psychologique et d’un nouvel l’impératif catégorique : sois désirable et tais-toi. C’est-à-dire sois consommable et tais-toi.

La coquetterie n’est plus un choix individuel mais une injonction sociale pour pouvoir rester sur un marché de la séduction toujours plus concurrentiel, instable et impitoyable.

Avant il était convenu que la vie n’était pas un défilé de mode et que nulle n’était tenue d’être un mannequin. Mais ça c’était avant. Désormais les femmes sont tenues d’être sexy. C’est une injonction très forte relayée par les magazines féminins comme par l’industrie de la publicité, de la mode ou du cinéma. Comme le chantait en 1984 le groupe Cookie Dingler dans Femme libérée  qui fut son seul et unique tube: « Elle rentre son ventre à chaque fois qu’elle sort, même dans Elle ils disent qu’il faut faire des efforts ».

Sans compter que l’essor de l’industrie pornographique est devenu l’un des moteurs de la croissance économique de nos sociétés et que sa banalisation culturelle consacre le triomphe de l’empire du mâle.

Cette industrie, qui repose exclusivement et ouvertement sur le rabaissement de la femme au statut de sex-toy, est devenue une des marques de fabrique de nos sociétés post-modernes malgré les postures émancipatrices qu’elles prennent parfois, par exemple en traquant jusque dans la grammaire toute expression (réelle ou supposée) de machisme. Il suffit en effet de regarder la couverture de n’importe quel magazine féminin pour comprendre que ces postures ne sont que des impostures. Le moindre article intitulé « Comment s’accepter telle que l’on est et assumer sa silhouette » est invariablement suivi d’un autre article intitulé « Comment perdre des kilos avant l’été »…

Pourtant dans une société qui revendique haut et fort l’émancipation pour tous, l’exhibition de femmes soumises aux désirs, aux humiliations et aux violences masculines devrait, en toute logique, susciter une politique publique volontariste de type abolitionniste.

Une politique publique de protection à destination non seulement des enfants – dont l’éducation sexuelle est confiée de facto aux bons soins de l’industrie pornographique – mais avant tout et surtout à destination de toutes les femmes dont la dignité humaine est ouvertement et délibérément bafouée. Après tout on a bien adopté une politique volontariste pour lutter contre les ravages du tabac. Et avec un certain succès…

Mais la libération des mœurs est comparable à la liberté du marché : elle est revendiquée par ceux qui en profitent et non par ceux qui en pâtissent. De même que la liberté de croquer est revendiquée par les prédateurs et non par leurs proies.

La libération des mœurs n’est que le manteau dans lequel se drape un refus archaïque et égoïste : le refus de tenir compte des autres. C’est le refus de ceux qui sont en position de force. C’est le refus de de s’imposer des limites, et donc des contraintes, par égard pour ceux – et en l’occurrence pour celles – qui sont dans une position de faiblesse structurelle.

C’est un refus qu’abrite le pavillon de complaisance de l’égalité formelle. L’égalité formelle vous connaissez ? C’est une hypocrisie qui consiste à décréter qu’à partir du moment où les règles du jeu sont les mêmes pour tous les forts et les faibles ont les mêmes chances. En économie cela consiste à supprimer les lois qui protégeaient les PME de la puissance des multinationales tout en prétendant qu’elles luttent à armes égales. En sport cela consisterait à supprimer la distinction entre compétitions masculines et compétitions féminines au nom de l’égalité. L’égalité formelle c’est ce que dénonçait déjà au XIXème siècle Henri Lacordaire : « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime et la loi qui affranchit ».

La libération des mœurs promue par ceux qui en profitent n’est que le masque derrière lequel se cache le refus des règles de vie qui garantissent ce que l’on appelle aujourd’hui le vivre-ensemble et qu’on appelait jadis le savoir-vivre.

Le retour à la liberté des mœurs reposent sur une valorisation de l’état de nature c’est-à-dire sur la négation même de l’idée de civilisation. Exalter la nature comme modèle des relations se fait toujours au détriment de la culture. Le retour à la loi de la jungle ne profite qu’aux prédateurs et aux nomades. Fort logiquement la « libération » des mœurs se fait au profit des mâles

Faire le mâle c’est à la fois une régression pour la femme, qui se trouve ravalée au rang d’objet, et pour l’homme qui régresse en humanité. Marchandisation des corps et déshumanisation des êtres sont les conséquences inéluctables d’une société où l’on s’autorise à faire le mâle.

Preuve supplémentaire, s’il en fallait encore une, que faire le mâle c’est vraiment pas bien…


[1] Extrait tiré d’un texte intitulé Humanité, second stade, préface à une réédition du SCUM Manifesto de Valerie Solanas.

Quand la raison s’enferme hors du monde

Peut-on tout comprendre? Et si oui, est-ce nécessaire pour raisonner adéquatement? Sylvain Aubé du blogue catholique québécois Le-Verbe (https://www.le-verbe.com/blogue/) s’appuie sur la riche réflexion de Gilbert K. Chesterton développée dans Orthodoxy pour examiner la question.

« Tous les gens veulent me tuer », dit le paranoïaque. « Mais non, personne ne veut te tuer », répond le thérapeute. « C’est exactement ce que diraient les gens s’ils voulaient me tuer! », conclut le paranoïaque.

La folie du sceptique

Avec un peu de recul, il faut admettre que le raisonnement du paranoïaque est sans faille. Si les gens voulaient le tuer, on ne le lui dirait pas. On le lui cacherait, et on inventerait toutes sortes de paravents pour masquer notre malveillance.

Plus nous serons méthodiques et insistants en lui démontrant qu’il n’y a aucun indice de complot contre lui, plus ses craintes seront alimentées. Il trouvera toujours une explication conforme à sa paranoïa pour chacun des éléments qu’on lui présente afin de le rassurer du contraire.

Son raisonnement est sans faille, mais en même temps, il est absurde. Il n’y a aucun motif probant pour croire qu’on veut le tuer, mais sa pensée est ainsi structurée que tous les faits qu’on lui avance confirment sa théorie. Ses syllogismes sont irréprochables, mais ses prémisses sont insensées.

En ce sens, sa folie n’est pas irrationnelle. Ce n’est pas l’intellect du paranoïaque qui défaille, c’est son expérience de la réalité. Sa folie ne sera pas corrigée par les arguments les plus rigoureux ; elle sera surmontée par une vision du monde plus large. Son problème n’est pas qu’il défend une idée erronée : c’est qu’il ne se soucie que d’une seule idée.

Le remède

Pour sortir de sa folie, le paranoïaque a besoin d’élargir son horizon mental. Il doit tenir compte de toute une série de considérations auxquelles il est étranger. Il doit admettre que la plus grande partie du monde échappe à sa compréhension.

C’est le grand drame d’une telle folie : on veut tout comprendre. Pour le paranoïaque, chaque évènement auquel il est confronté peut être intégré dans son explication du monde. Chaque fait qu’on lui avance trouve une place précise et utile dans son système de pensée. Rien n’est laissé au hasard ou à l’ignorance. Tout est intelligible et significatif.

Pour retrouver la santé mentale, il doit donc renoncer à cette immense ambition intellective. Il doit humilier sa posture et se réduire au simple mortel qu’il est, noyé dans un univers complexe et déroutant.

Ainsi, il découvrira que sa pensée ne touche qu’un fragment de la réalité. Il goutera aux tourments et aux joies de l’incertitude et de ses possibilités. C’est ensuite seulement qu’il pourra reconnaitre que les prémisses de sa paranoïa sont insensées.

Le poète ne demande qu’à mettre sa tête dans les cieux alors que le logicien aspire à mettre les cieux dans sa tête, et c’est sa tête qui se brise.

– G. K. Chesterton

Je reprends cette réflexion à Chesterton qui faisait valoir (Orthodoxy, II: The Maniac) qu’un logicien est plus à risque qu’un poète de sombrer dans une telle folie : « Le poète ne demande qu’à mettre sa tête dans les cieux alors que le logicien aspire à mettre les cieux dans sa tête, et c’est sa tête qui se brise ».

À trop vouloir expliquer, on perd la faculté de percevoir le monde tel qu’il est. La santé mentale exige un vaste espace pour l’inconnu qui nous dépasse.

Le rapport à l’inconnu

Comment réagit-on face à un témoin qui affirme avoir vu un fantôme? On est sceptique, bien sûr. Mais de quel scepticisme parle-t-on? Est-ce qu’on doute de son témoignage en estimant qu’une illusion est plus vraisemblable qu’un fantôme? En principe, c’est la posture d’un sceptique cohérent.

Néanmoins, plusieurs personnes se réclament du scepticisme afin de soutenir la certitude qu’il n’existe rien d’immatériel comme les fantômes. Leur incrédulité face à l’immatériel s’est cristallisée en une certitude négative : ils sont convaincus que les fantômes n’existent pas et ils disqualifient d’emblée tous les témoignages, peu importe leur nombre et leur crédibilité, qui soutiennent l’existence des fantômes. Ce faisant, ils se rapprochent de la folie du paranoïaque.

En effet, de tels sceptiques présupposent que toute la réalité s’explique à partir d’une seule idée. « Tous les gens veulent me tuer » et « Toute la réalité est matérielle » sont deux postulats également totalitaires sur la pensée. Toutes les hypothèses, toutes les possibilités doivent se soumettre à l’idée suprême.

Je précise que je ne crois pas aux fantômes. Je soutiens plutôt que la nature immatérielle des fantômes ne suffit pas pour conclure qu’ils n’existent pas. L’existence des fantômes est invraisemblable, mais elle n’est pas impossible. J’adhère à la position du sceptique qui doute de l’existence des fantômes. Je dénonce le sceptique qui ne doute pas: celui qui est certain que les fantômes n’existent pas.

La certitude du sceptique tronque son regard sur la réalité.

La certitude du sceptique, comme la certitude du paranoïaque, tronque son regard sur la réalité.

Par ailleurs, je ne prétends pas offrir ici le moindre argument de fond à savoir s’il existe une réalité immatérielle. Je souligne plutôt que, s’il existe une telle chose, aucun argument intellectuel ne pourra le démontrer au sceptique certain du contraire. Comme avec un paranoïaque, il faudra plutôt offrir un remède à sa certitude : il faudra lui révéler son insuffisance pour expliquer notre expérience du monde dans toute son incongruité.

Liberté de pensée

Si je crois qu’il existe une réalité immatérielle, je demeure libre de croire que la plus grande partie du monde est composée d’objets matériels. Je peux admettre que l’univers comporte des réalités multiples et étonnantes. Je peux adapter ma pensée aux découvertes qui s’offrent à moi, même si elles détonnent avec ce que je sais. Aucune conviction ne m’interdit une connaissance inattendue.

Par contraste, le sceptique certain ne peut admettre la moindre dérogation à sa conviction matérialiste. Tous les évènements doivent se conformer à son schème explicatif. Toutes les découvertes sont filtrées par son critère unidimensionnel. L’interdit du sceptique est vaste et sans compromis.

Là où je peux être méfiant envers plusieurs personnes, le paranoïaque ne peut accorder sa confiance à qui que ce soit. Là où mon monde spirituel inclut des montagnes de matière, le monde matériel du sceptique ne tolère pas une miette d’esprit. Le paranoïaque et le sceptique s’interdisent de croire que l’univers leur réserve des surprises.

La rigueur intellectuelle du paranoïaque et du sceptique est inattaquable, mais leur vision du monde est affligée par une folle conviction.

Sylvain Aubé

27 mars 2019

Sylvain Aubé est fasciné par l’histoire humaine. Il aspire à éclairer notre regard en explorant les questions politiques et philosophiques. Avocat pratiquant le droit de la famille, son travail l’amène à côtoyer et à comprendre les épreuves qui affligent les familles d’aujourd’hui.

Vous pourrez retrouver son article à l’adresse :  https://www.le-verbe.com/blogue/quand-la-raison-senferme-hors-du-monde/

Tous ses autres articles sont disponibles à l’adresse : https://www.le-verbe.com/author/sylvain-aube/

Face à BFM-TV que disent les baptisés ?

Les violences commises par certains gilets jaunes comme les violences policières sont relayées en boucle par les chaînes d’information continue et choquent légitimement les téléspectateurs.

Parmi ces derniers certains sont davantage choqués par les premières, d’autres par les secondes. Les sensibilités et les affects prennent alors facilement le pas sur la réflexion. L’indignation est en effet une activité grisante, valorisante et addictive.

Le problème c’est qu’elle nous détourne des problèmes concrets et des situations tragiques qui font le quotidien de nos concitoyens.

Dans ce phénomène de folie collective les chaînes d’information continue comme BFM TV, CNews ou LCI jouent un rôle d’incubateur. Leur influence (néfaste) est à la mesure de leur responsabilité morale : énorme !

Tirant prétexte de la liberté d’expression elles se livrent à une entreprise de désinformation pour des raisons structurelles et non accidentelles en offensant à la fois la vérité et la charité…dans le silence assourdissant de nombreux baptisés.

1/ Un business model consistant à contrefaire l’actualité plutôt que de la décrire

Leur business model impliquant de maintenir en haleine les téléspectateurs pour faire de l’audimat et pouvoir facturer au prix le plus élevé leurs encarts de publicité, ils approvisionnent les téléspectateurs – volontaires ou pas puisque les écrans sont déployés dans les lieux publics désormais (café, salons de coiffure, halls d’hôtel etc.) – en images choquantes qui nourrissent à leur tour les passions partisanes.

Mais surtout les chaînes d’information continue ont opéré une mutation en se transformant en chaînes de désinformation continue dans la mesure où elles s’arrogent désormais le droit de faire l’actualité en contrefaisant la réalité.

Le procédé est connu : c’est le mensonge par omission. Cela consiste à occulter une partie de la réalité en s’abstenant systématiquement et consciencieusement de replacer dans le contexte politique et social les événements que l’on rapporte. Car seul le contexte peut leur donner leur sens et permettre un débat rationnel sur les solutions à apporter et les choix politiques à consentir pour y parvenir.

Le principe est pourtant simple et connu des exégètes comme des historiens ou des services de renseignement : pas de texte sans contexte sinon l’information vire à la propagande.

Les mêmes images de violence présentées en-dehors de tout contexte tournent en boucle toute la journée sans qu’aucun journaliste ne vienne préciser, par exemple si les scènes de violences sont sporadiques et ponctuelles ou au contraire durables et représentatives de l’ensemble des manifestants à l’échelle du pays.

Les chaînes d’information continue présentent des images de violence mais passent sous silence leurs causes profondes. Le poids de leurs mots ne fait plus contrepoids au choc de leurs photos. Elles s’en tiennent à un discours légaliste sur le respect des institutions démocratiques ce qui, malgré les apparences, est un choix qui n’est pas neutre.

Ce choix n’est ni anodin ni innocent.

D’abord parce que c’est une manière de focaliser l’attention sur les symptômes des problèmes plutôt que sur leurs causes profondes alors que cette question est la seule qui mérite de retenir l’attention.

Ensuite et surtout parce que c’est une manière d’occulter le fait que précisément les institutions démocratiques ne fonctionnent plus comme des institutions démocratiques depuis longtemps et que c’est exactement cela qui est dénoncé depuis des années.

L’imposition du traité de Lisbonne en violation du verdict du référendum, la législation décidée à Bruxelles ou le renoncement volontaire aux compétences relevant de la souveraineté populaire sont autant d’atteintes au principe de souveraineté populaire et donc de démocratie.

Pourtant on ne les a jamais entendus les dénoncer au nom du devoir d’informer. Deux poids, deux mesures. Le pire c’est qu’ils semblent être les seuls à ne pas s’en apercevoir.

2/ Le parti pris du déni

Du point de vue de l’analyse c’est un manque de justesse, du point de vue moral c’est un manque de justice.

En agissant comme elles le font les chaînes d’information continue ajoutent au déni de souffrance d’une partie de nos concitoyens un déni d’urgence.

Elles font comme si leurs souffrances pouvaient (encore) patienter et attendre les résultats improbables de processus institutionnels, processus par nature consultatifs et itératifs qui ne peuvent déboucher que sur des propositions de compromis. Bref, des processus qui, par définition, ne peuvent être des procédures d’urgence.

Mais surtout elles laissent suggèrent que les problèmes politiques dénoncés par les gilets jaunes pourraient être réglés par la logique institutionnelle qui les a engendrés et par le personnel politique qui les a cautionnés.

Du pur point de vue intellectuel c’est une absurdité. Comme le disait Albert Einstein « On ne peut pas résoudre un problème avec le même niveau de pensée que celle qui l’a créé ».

Du point de vue de l’expérience humaine c’est exactement la même chose : il ne faut pas compter sur ceux qui ont créé les problèmes pour les résoudre. Surtout si cela suppose qu’ils se remettent eux-mêmes en cause.

Un parti pris qui n’est pas assumé est un mensonge : en exhibant ad nauseam des images de violence et en les tirant de leur contexte les chaînes d’information continue prennent objectivement parti contre les gilets jaunes et, implicitement, pour le gouvernement dont jamais elles ne soulignent les contradictions, les mensonges, les postures ou les impostures.

Elles semblent croire qu’en cassant le thermomètre – en l’occurrence en passant sous silence les problèmes de fond – on pourrait faire baisser la fièvre. En se contentant d’arguments biaisés elles convainquent que ceux ont déjà choisi de détourner le regard par peur ou par commodité.

Mais elles ne feront jamais qu’exacerber la colère légitime de ceux qui constateront une nouvelle fois que leur sort et leurs souffrances n’intéressent pas le gouvernement – ils le savaient déjà – mais également tous ceux qui se sentiront solidaires de leurs revendications.

Hormis le témoignage sur les réseaux sociaux des quelques baptisés solidaires des gilets jaunes, l’attitude de l’ensemble des baptisés est assez accablante. Dans le meilleur des cas ils brillent par leur absence dans les rues et les manifestations et dans le pire des cas manifestent sur les réseaux sociaux leur absence de solidarité quand ce n’est pas un mépris de classe anti-évangélique.

3/ Le silence assourdissant de nombreux baptisés

L’option préférentielle pour les petits, les pauvres, ceux qui souffrent est celle de Jésus-Christ et de ses disciples fidèles. De ce point de vue le silence des catholiques pourtant prompts à dénoncer les mensonges des chaînes de désinformation continue est assourdissant. La défense des enfants condamnés à ne pas avoir de pères et de mères les a mobilisés en masse à l’occasion de la Manif pour tous mais le sort de leurs concitoyens qui ne peuvent plus joindre les deux bouts ne les mobilise pas.

Non seulement il ne les mobilise pas mais il suscite parfois – et trop souvent – sur les réseaux sociaux des réactions de rejets, des réflexes de castes incompatibles avec la notion de Bien commun qui est si souvent invoquée, avec la doctrine sociale de l’Eglise et plus radicalement avec l’évangile.

On touche du doigt là l’effet de rétrécissement du catholicisme français qui se superpose globalement à la carte électorale du vote de la bourgeoisie catholique (vote Fillon). L’appartenance majoritaire à cette classe sociale particulière explique que de nombreux catholiques en aient les réflexes et les œillères.

Difficile en effet de penser contre son pain.

Surtout quand on a orienté délibérément ses enfants vers les métiers de l’argent. Pour bien des baptisés malheureusement seuls comptent les métiers qui comptent : quand on a envoyé ses enfants dans des écoles de commerce et qu’ils ont ensuite fait carrière dans la banque ou les compagnies d’assurance, difficile de remettre en cause les méfaits de la financiarisation de l’économie et de regarder en face le sort des perdants de la dérégulation mondialisée.

C’est d’autant plus difficile de comprendre le désarroi de ses concitoyens qu’on a soigneusement évité de choisir des métiers qui ont du sens mais qui rapportent moins comme ceux de la formation ou de l’information (dont on se plaint après qu’ils soient hostiles au christianisme), des métiers artisanaux (alors même qu’on déplore le manque de techniciens formés et spécialisés contrairement à ce qui se fait en Allemagne) ou les métiers artistiques (et on se lamente que la société dans laquelle nous vivons fasse la promotion du laid et du sordide).

C’est d’autant plus difficile d’éprouver de la compassion et de la solidarité pour ceux qui se sentent partir à la dérive et invoquent la solidarité nationale qu’on a soi-même été scolarisé dans des établissements « catholiques » où l’on a été éduqué dès son plus jeune âge à la sélection sociale par l’exclusion scolaire… sous prétexte de former l’élite chrétienne de demain.

4/ Témoignage et contre-témoignage

Le drame c’est quand les chrétiens qui normalement sont dans le monde sans être du monde agissent et réagissent en fait comme des mondains plutôt que comme des chrétiens.

Cela ne signifie pas que les baptisés doivent nécessairement approuver toutes les revendications – par ailleurs contradictoires – exprimées par les gilets jaunes.

Cela n’implique pas de considérer que toute revendication qui accompagne une souffrance est ipso facto légitime, opportune ou réalisable.

En revanche le baptême nous oblige à entendre la souffrance qui s’exprime et de regarder en face ses causes objectives plutôt que de détourner le regard ou de se réfugier dans l’ironie quand ce n’est pas dans la moquerie et le mépris.

Il nous oblige également à ne pas rester dans la cabine du commentateur qui, du haut des gradins, commente le match qui se déroule sur le terrain, décernant bons et mauvais points dans une indifférence totale au sort et aux souffrances de leurs frères.

L’hostilité à peine voilée et parfois carrément affichée de certains baptisés au sort des gilets jaunes et de tous ceux pour lesquels défilent les gilets jaunes ne sont pas le résultat d’une réflexion honnête et pondérée mais l’expression décomplexée de réflexes de castes, l’expression d’un parti pris, l’affirmation tranquille d’une indifférence au sort de prochains dont on refuse de se sentir proches parce qu’on ne les fréquente pas et qu’on ne veut pas avoir à les fréquenter.

Le pire des arguments qu’il m’ait été donné de lire était que les gilets jaunes n’étaient pas les plus pauvres et que les « vrais » pauvres étaient trop pauvres pour se permettre de défiler.

Ce constat sociologique est parfaitement vrai était mais constitue le pire des arguments puisqu’il ne servait qu’à délégitimer la détresse, bien réelle, de ceux qui avaient encore la force et les moyens de descendre dans la rue pour dénoncer leur abandon progressif et programmé par les pouvoirs publics, les institutions et plus généralement la solidarité nationale.

C’est l’argument du déni de souffrance et de l’indifférence. Un peu comme ces victimes de harcèlement sexuel auxquelles dont on refuse d’enregistrer la plainte sous prétexte qu’elles n’ont pas été violées…

Faute de souffrir dans leur chair les souffrances de ceux qui défilent dans la rue certains chrétiens présents sur les réseaux sociaux refusent de réfléchir et de regarder en face la réalité  tragique que vivent une partie de leurs concitoyens.

Comme l’écrivait Charles Péguy dans Notre jeunesse : « Il faut toujours dire ce que l’on voit : surtout il faut toujours, ce qui est plus difficile, voir ce que l’on voit ».

Là encore rien de nouveau – le refus d’agir engendre le refus de savoir – mais ce contre-témoignage là aura des conséquences bien plus durables et incommensurables auprès de la population française déjà passablement déchristianisée.

Beaucoup plus graves en tout cas que les conséquences pourtant déjà très graves des abus sexuels commis par certains prêtres et couverts par des évêques ou par des cardinaux.

Pourquoi ?

Parce que dans le cas des gilets jaunes ce ne sont pas seulement les clercs qui sont en cause mais également les laïcs.

Et là c’est bien l’Eglise de France en tant que communauté chrétienne – et non plus seulement la hiérarchie ecclésiastique – qui répond majoritairement aux abonnés absents.

« Voici comment on distingue les enfants de Dieu et les enfants du diable : celui qui ne vit pas selon la justice n’appartient pas à Dieu, et pas davantage celui qui n’aime pas son frère » (1 Jean 3,10).

Sam parle…et vous ?

On recommence enfin à parler d’évangélisation dans l’Eglise et c’est une bonne nouvelle. Mais la plupart du temps on l’envisage sous la forme d’une activité de groupe et spécialisée (Anuncio, Aïn Karem).

On l’envisage plus rarement comme une activité individuelle qui incombe à chaque baptisé.

Pourtant il s’agit moins de convaincre et de recruter que de témoigner sereinement de ce que l’on vit – en l’occurrence de témoigner ce que Jésus Christ a changé et continue à changer dans ma vie.

Comme nous le dit saint Pierre : « Soyez toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui est en vous ; mais faites-le avec douceur et respect » (1 Pierre 3,15)

Encore faut-il pour cela s’adresser à ceux que l’on connaît parce qu’on les fréquente et s’adresser à eux d’une manière qui leur parle.

C’est exactement ce que fait Sam, un jeune Québécois sur le site https://www.samparle.org/.

Sam témoigne avec enthousiaste auprès de ses concitoyens québécois de sa foi et de la joie qui en découle dans des petits enregistrements vidéo.

Chaque vidéo porte sur une question concrète et la traite de façon sérieuse sans se prendre au sérieux : théologique, authentique et ludique.

Je vous en recommande tout particulièrement deux.

La première est la vidéo intitulée Je suis athée qui renoue avec la tradition apologétique et qui démontre les incohérences de ceux qui revendiquent leur athéisme. Le ton n’est pas polémique même si l’argumentation est sans concession et explique que sa vidéo ait suscité beaucoup de réactions au Québec, pays extrêmement déchristianisé après avoir été pendant plusieurs siècles un pays à la fois très christianisé et très cléricalisé, ceci expliquant cela….

L’autre vidéo est intitulée Chrétien et Québécois et constitue un témoignage personnel qui fait penser à la description qui est donnée des chrétiens dans la fameuse Lettre à Diognète rédigée à la fin du IIème siècle : « Les chrétiens ne sont distingués du reste des hommes ni par leurs pays, ni par leur langage, ni par leur manière de vivre ; ils n’ont pas d’autres villes que les vôtres, d’autre langage que celui que vous parlez ; rien de singulier dans leurs habitudes. (…) Ils habitent leur cités comme étrangers, ils prennent part à tout comme citoyens, ils souffrent tout comme voyageurs ».

C’est un témoignage authentique, profond, à la fois drôle et poétique sous forme de slam avec en prime la richesse et la vitalité de la parlure québécois….

L’auteur a accepté de m’envoyer le texte de cette vidéo que je m’empresse de vous proposer tout en vous recommandant fortement d’aller le voir et l’écouter sur son site sur son site et sur Youtube

Chrétien et Québécois

J’m’appelle Sam.

J’suis un Québécois des plus ordinaires, mais j’crois dans un Dieu extraordinaire.

            Attention;

Je ne suis pas crétin;

Mais bien chrétien.

Je ne suis pas sectaire ni fanatique,

Mais un jour j’ai fait la rencontre salutaire d’un Dieu magnifique.

Je ne suis pas idéaliste ni ennuyeux,

J’vous le dit, j’suis réaliste et ambitieux.

Je ne suis pas un de ces religieux prétentieux ni un hypocrite,

J’en ai rien à faire des titres ni des rites,

ce qui m’intéresse c’est le bon Dieu.

Comme vous, j’bois de la caféine pour soulager mes matins fatigués;

J’travaille temps plein pour payer mes comptes chargés,

Mais j’marche d’un pas léger;

Et j’ai une joie que personne ne peut m’enlever.

j’fais mon jogging ;

j’sors mes vidanges ;

j’salue mes voisins ;

mais j’accomplis ma routine du quotidien

avec un entrain qui me provient du divin.

J’m’en ouvre une frette pour décompresser ;

J’savoure un bon p’tit vino pour relaxer ;

mais je trouve ma plus grande paix et sérénité ;

dans celui qui est de toute Éternité.

J’aime jouer, fêter et danser;

jaser, manger et trinquer;

Mais toutes ces activités, je ne pense pas que ce sont des finalités,

Mais plutôt, des plaisirs partagés et passagers

à profiter à l’honneur de celui qui les a pensés.

Je mords dans la vie et dans tout ce qu’elle a de Bon à m’offrir;

Mais mon plus grand bien est de m’offrir à celui qui est Bon.

Je ne pense pas avoir réponse à toutes les questions,

ni solution à toutes les éventualités,

Mais au moins j’ai quelqu’un en qui je peux compter,

peu importe la gravité de la situation.

Loin de fuir la réalité ou d’anesthésier mon anxiété avec quelques brides de moralités,

J’ai décidé d’arrêté de vivre comme si j’étais le centre de gravité

et j’ai tout misé sur le seul qui a garanti pouvoir me sauver.

Je ne pense pas changer ce monde et, vraiment, je n’y peux rien,

mais je connais Celui qui a changé le monde et qui peut changer le tien.

Je ne m’exclus pas de la société, ni des débats de l’actualité,

Mais je leur offre, au mieux de mes capacités, une critique équilibrée

basée sur la parole du fondateur de l’humanité.

Je prône la culture et l’identité québécoises et je défends notre belle langue française,

Mais j’n’oublie jamais que mon passage sur cette terre n’est que temporaire

et que ma réelle identité est celle d’un étranger qui appartient à une autre cité.

J’applaudis le progrès technologique,

J’admire le travail scientifique,

Je ne nie pas la réalité,

Mais je crois en celui qui l’a fabriqué et qui en détient l’ultime vérité.

J’me suis pas créé un monde imaginaire pour m’évincer de mes soucis;

Je pense plutôt que j’ai été créé pour un monde mille fois meilleur que celui-ci.

Comme tout le monde, j’check les habs

et je suis un fan du bleu, blanc, rouge,

Mais ma plus grande victoire me provient

de celui qui a versé du rouge pour que je devienne blanc.

Celui qui a bu la coupe de jugement et qui en a versé de son sang

pour remporter la plus grande coupe Stanley de toute l’humanité.

J’essaie de faire preuve de civisme et de générosité,

Faire ma B. A. quand j’en ai l’opportunité,

Mais je sais qu’à la fin de la journée,

Le mal m’est tellement bien ancré,

Que ce n’est pas l’éducation, la société ou ma propre bonté

qui pourra m’en délivrer,

Je crois plutôt que c’est celui qui a traversé l’adversité

de son propre choix,

qui a été élevé entre ciel et terre sur cette infâme croix,

et qui est revenu des morts en guise de quoi,

des hors-la-loi comme toi pi moi,

avons quelqu’un en qui mettre notre foi.

Quelqu’un en qui placer notre confiance et notre espérance.

Quelqu’un qui a vécu la vie que nous aurions dû vivre ; subi la mort que nous aurions dû subir.

Quelqu’un qui a payé pour nos saletés et qui est ressuscité pour nous le prouver.

Quelqu’un qui se nomme Jésus.

Comment parler à nos frères musulmans ?

Comme dit Gaspard Proust, un chrétien intégriste qui applique le Nouveau Testament à la lettre, c’est un mec qui se met à embrasser tout le monde dans la rue ! On peut reprocher aux intégristes chrétiens de ne pas aimer assez leur prochain mais dans ce cas on leur reproche de ne pas être assez chrétiens.

Le problème est très différent avec un musulman intégriste car lui peut se targuer d’être un vrai musulman conforme au Coran !

Tel est le drame : face à un livre réputé dicté par Dieu lui-même et à la virgule près l’objection de conscience des créatures n’a aucune légitimité et donc aucun poids face aux décrets du Créateur.

1/ Le Coran source de l’islamisation des sociétés non-musulmanes

Dire que le Coran est la matrice de l’islamisation de nos sociétés c’est courir le risque de froisser des susceptibilités et blesser des gens de bonne foi – sans mauvais jeu de mots – mais peut-on espérer résoudre un problème politique de dimension géopolitique si on n’ose même pas le nommer ?

Tous les musulmans qui cherchent à être authentiquement fidèles au Coran par souci d’intégrité correspondent à ce que nous considérons comme des musulmans intégristes. C’est très gênant à dire mais c’est malheureusement difficile de ne pas faire ce constat à moins de vouloir – sans mauvais jeu de mots là encore – se voiler la face.

Car tous les intégristes musulmans ont pour eux la lettre du Coran tandis que les autres musulmans n’ont que leur conscience pour s’indigner sincèrement de leur intolérance et de leur violence programmée mais restent impuissants à répondre à leurs arguments.

Je ne parle pas ici des djihadistes mais de tous les musulmans qui sans passer à l’acte approuvent de ne renoncer au jihad que temporairement et pour des raisons tactiques. Ce sont les mêmes qui approuvent le principe de ne tolérer les juifs et les chrétiens qu’à condition qu’ils vivent en citoyens de seconde classe (dhimmis). Ils assument l’idée de convertir les autres non-croyants sous la contrainte et de punir de mort ceux qui quittent l’islam. Ils contestent aux femmes (c’est-à-dire à plus de la moitié de l’humanité !) les droits qui découlent de leur dignité intrinsèque et cherchent à imposer les règles de la charia dans l’espace public c’est-à-dire à tous : aux musulmans comme aux non-musulmans.

Ces musulmans qui se jugent intègres et que nous jugeons intégristes ne sont pas irrationnels : ils sont au contraire dans une démarche sincère de cohérence avec les prescriptions du Coran.

Car le Coran n’est pas simplement un livre religieux c’est aussi et surtout un mode d’emploi pour répandre la soumission (en arabe islam) à un Dieu unique sans s’embarrasser nécessairement du consentement des intéressés.

C’est une religion inventée par l’homme pour l’homme dans la mesure où les prescriptions qu’il contient fournissent une justification pratique aux pulsions masculines : fascination pour la violence, appétits de conquête et volonté de puissance.

Il n’appelle pas les hommes à convertir leur cœur mais les mobilise pour servir une cause sacrée qui exalte leurs tendances les plus profondes et les plus obscures.

Certes le terrorisme islamique a de nombreuses causes géopolitiques, économiques et sociales mais il a une matrice qui est le Coran.

2/ Parler à nos frères musulmans d’autre chose que du Coran.

Les musulmans que nous considérons comme modérés ne sont pas des musulmans conformes au Coran. Les musulmans que nous considérons comme ouverts et tolérants sont considérés par des traîtres et des apostats par ceux qui veulent rester ou redevenir cohérents avec le Coran. Les musulmans que nous considérons comme bons ils ne les considèrent pas comme de bons musulmans.

Mais la bonne nouvelle – car il y en une – c’est que ces « mauvais » musulmans sont très nombreux.

C’est d’ailleurs la masse de ces musulmans indécis qui est l’enjeu de la stratégie de l’Etat islamique. Ce dernier veut cliver l’ensemble des musulmans contre l’ensemble des non-musulmans et spécifiquement des juifs et des chrétiens. Il veut obliger tous les musulmans à choisir leur camp.

C’est pour cela que le pape François fait tout ce qu’il peut pour ne pas entrer dans son jeu et qu’il refuse de se positionner contre le monde musulman.

Nulle naïveté chez lui. Il est mieux informé de la réalité du monde musulman et de la situation des chrétiens d’Orient que tous ses détracteurs qui, contrairement à lui, ne disposent pas du réseau de renseignement incomparable que constituent la structure de l’Eglise catholique et les services du Vatican.

Simplement on ne lutte pas contre un adversaire en lui donnant ce qu’il cherche à obtenir.

Car si l’Etat islamique cherche à enrôler l’ensemble des musulmans derrière sa bannière c’est précisément parce que tous les musulmans ne règlent pas spontanément leur vie sur les prescriptions du Coran.

Les partisans de l’Etat islamique, les salafistes, les Frères musulmans et les barbus de tout poil veulent substituer à ce Coran alternatif un Coran authentique et intègre.

La seule chose qui soit rassurante c’est que, alors que les chrétiens ne sont jamais vraiment à la hauteur des exigences de l’Evangile, il existe des musulmans qui valent mieux que le Coran.

En tant que citoyens français nous devons avoir le courage de mettre le sujet sur le tapis – là encore sans mauvais jeu de mots – afin de définir ce qui dans notre pays et dans notre système politique relève du non-négociable.

Mais en tant que chrétiens nous avons le devoir urgent d’annoncer à nos frères musulmans que Dieu s’est fait homme par amour pour eux et qu’Il est mort et ressuscité pour qu’ils soient sauvés.

Nous avons l’impérieux devoir de leur annoncer la très bonne, l’excellente nouvelle : « Vous êtes déjà sauvés par Dieu ! »

« Vous n’avez plus qu’à accepter d’être sauvés en convertissant votre cœur et donc vos mœurs à ce que le Dieu unique vous propose : la sainteté ! »

« Dieu est Amour, pas amère ! »

Un seul Dieu : oui mais lequel ?

Pour un chrétien le musulman est son frère en humanité.

Du moins pour un chrétien qui essaie de prendre le Christ pour modèle au lieu de substituer au Christ ses propres aspirations.

Pourquoi ? Parce que le chrétien sait que tous les hommes sont tous enfants de Dieu, qu’ils soient chrétiens, musulmans ou autres.

Il croit que nous sommes tous frères parce que nous avons tous le même Père.

1/ Tous enfants d’un même Père

Nous sommes tous frères parce que nous avons tous le même Père, fort bien, mais notre frère peut aussi bien être un forban et c’est là que les difficultés commencent car si on choisit ses amis on ne choisit pas sa famille et avoir un ancêtre commun ne garantit rien.

Rien de plus inexpiables que les haines et les rancœurs familiales. L’histoire de la dynastie mérovingienne et de manière plus générale l’histoire féodale ne sont pas autre chose qu’une longue et sanglante litanie de règlements de comptes intra-familiaux.

Il n’existe rien de pire que les guerres que l’on qualifie de fratricides. L’exemple biblique de Caïn et Abel est suffisamment éloquent pour que les chrétiens qui se donnent la peine de lire la Parole de Dieu pour s’en nourrir n’aient aucune illusion sur la réalité des familles.

Le chrétien le sait bien : la famille est une réalité à évangélise en permanence, qu’il s’agisse de la famille mononucléaire – la famille telle qu’elle est défendue par les partisans de La Manif pour Tous – ou la grande famille de l’humanité. C’est un travail de longue haleine et à remettre cent fois sur le métier.

Mais le chrétien croit que la volonté de Dieu est qu’il traite tout homme comme son frère, en l’aimant comme un frère.

Parce qu’il croit que Dieu est Dieu le Père et qu’à ce titre Il est le modèle de toute paternité et que c’est pour cela qu’Il nous traite comme Ses enfants.

C’est une évidence pour le chrétien qui connait sa foi. Ce ne l’est absolument pas pour son frère musulman même et surtout s’il connaît la sienne.

Pour ce dernier Dieu est le Créateur de toute chose, et entre autres choses de l’humanité, mais il n’y a pas a priori d’analogie entre Dieu et l’homme.

Dieu est le Tout-autre et demeure donc hors de portée. Il n’y a rien de commun entre Lui et l’homme. Aucun patrimoine génétique commun. Contrairement à ce que croit le chrétien.

2/ Un Dieu créateur qui est aussi Père

Car le chrétien croit qu’en tant qu’homme il a été conçu à l’image et à la ressemblance de Dieu – « Dieu dit : faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance » (Genèse 1, 26) – et que c’est pour cette raison qu’Il a laissé Son empreinte en lui.

D’abord en le dotant d’une conscience qui murmure à son intelligence des vérités que sa volonté consciente n’a pas toujours envie d’entendre.

Ensuite en imprimant en lui un désir d’amour tellement infini que rien dans ce monde fini ne parvient à satisfaire.

Comme disait saint Augustin : « Qui donc pourra combler les désirs de mon cœur Répondre à ma demande d’un amour parfait ? Qui, sinon toi, Seigneur, Dieu de toute bonté, Toi l’amour absolu de toute éternité ? Plus près de Toi, mon Dieu, j’aimerais reposer : c’est Toi qui m’as créé et Tu m’as fait pour Toi ; mon cœur est sans repos tant qu’il ne demeure en Toi ! »

Le chrétien sait qu’il est paramétré pour entrer en communion avec Dieu parce que Dieu l’a programmé pour cela. Parce que c’est sa vocation intrinsèque.

3/ Une relation de communion plutôt que de soumission

Le chrétien croit que Dieu a souverainement décidé de descendre de son piédestal divin pour aller à sa rencontre et tisser une relation d’intimité avec lui sur un pied d’égalité.

Dieu incarné dit à ses disciples : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ignore ce que veut faire son maître; maintenant, je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai appris de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jean 15, 15).

Une telle intimité avec Dieu est loin d’être acquise pour un musulman, sauf peut-être pour les mystiques soufis. Mais pour qui s’en réfère à la lettre du Coran quelle pire atteinte  à la dignité de Dieu, à Sa seigneurie que la phrase de saint Irénée : « Notre Dieu s’est fait homme pour que l’homme soit Dieu » ? Tel qu’Il est présenté dans le Coran Dieu ne promet pas une rencontre intime de l’homme avec Lui.

Le Coran recommande aux musulmans de convertir les non-musulmans et de les intégrer ainsi dans la communauté des croyants (Oumma) au sein de laquelle tous seront égaux dans la soumission (islam) respectueuse à Dieu. Mais il n’est pas question de nouer une relation intime et personnelle avec Dieu ou d’aimer les non-musulmans au seul motif qu’ils sont les frères d’un même Père.

Certes le chrétien et le musulman se rejoignent dans l’opposition au polythéisme et tous deux affirment qu’il n’existe qu’un seul Dieu.

Mais reste à savoir lequel…